Un chemin de la Retirada

Reconstituer la chronologie

Voilà que vous commencez à vous retrouver avec tout un tas d'anecdotes, d'informations diverses et variées, dont certaines peuvent vous paraître se contredire un peu.

Vous avez relevé des noms dont vous n'aviez sans doute jamais entendu parlé auparavant, quelques dates plus ou moins approximatives, et de nombreux renseignements qui - pour l'instant - ne vous semblent que de peu d'utilité.
Peut-être qu'au hasard de vos pérégrinations, l'un ou l'autre de vos interlocuteurs vous a remis des photos et/ou documents de l'époque qui a précédé la guerre civile, ou de la période où les membres de votre famille étaient détenus dans un camps français ou travaillaient dans une compagnie de travailleurs étrangers.

Si vous avez bien suivi les conseils n° 1 à 8,  vous avez pris une multitude de notes qui remplissent un ou plusieurs carnets ; notes que vous avez mises au propre, au fur et à mesure, dans un document-texte.

Tout ce que vous avez pu rassembler jusqu'ici, forme à présent un long texte sans queue ni tête, une histoire décousue, un innommable fouillis incohérent. Une chatte n'y retrouverait pas ses petits !

Il est plus que temps de mettre un peu d'ordre dans tout ça et, s'agissant d'ordre, celui qui donnera sens à votre histoire est bien sûr l'ordre chronologique.

Ainsi, exactement comme on reconstituait un énoooorme puzzle, nous allons patiemment reconstituer le chemin parcouru par les membres de votre famille en emboîtant les évènements les uns dans les autres de façon à former un récit cohérent.

Conseil n°9 : Posez les jalons

Pour aborder au mieux cette nouvelle étape de vos travaux, il faut commencer par préparer le terrain et pour cela, rien de mieux que de poser quelques jalons.

Vous allez voir, c'est tout simple !

Relisez votre document-texte et chaque fois que vous changez de thème, arrêtez votre lecture et donnez un titre à la partie que vous venez de terminer.

Il ne s'agit pas ici de se montrer très créatif ou original. A ce stade, vos titres n'ont pas besoin d'être jolis, ils doivent seulement être pratiques !

On pourra, par exemple, marquer les périodes de la vie ("Enfance", "Adolescence",...) ou les évènements  familiaux ("Baptême de ..." , "Mariage de ...") ou utiliser des repères géographiques en indiquant le nom des villes ou des régions successives où se sont déroulés les faits. On pourra aussi simplement inscrire une date, une année, une période...

L'objectif est double. Primo, faire ressortir les étapes importantes de votre récit. Deuxio, marquer visuellement les endroits où commencent et s'achèvent les parties majeures.

C'est ce qui, au final, vous permettra de suivre sa progression.

 

Matérialisez

les étapes importantes de votre récit

en découpant votre texte en parties

auxquelles vous donnerez des titres.

 

Conseil n°10 : Mettez de l'ordre

 

Organisez votre document-texte

afin que sa structure

suive le déroulement de votre récit.

 

Grâce aux jalons que vous avez posés, vous allez facilement pouvoir ordonner votre texte en déplaçant les couples "titre/paragraphe".

Commencez par déplacer et regrouper ceux qui évoquent des épisodes survenus au cours d'une même période ou au même endroit.

Puis, identifiez et repérez, parmi les informations que vous auront données vos interlocuteurs, les indicateurs qui associent les anecdotes entre elles, qui les relient les unes aux autres.
Par exemple : tel souvenir qui implique le cousin Arturo, alors adolescent, est forcément antérieur à cet autre souvenir où Arturo est présent avec son épouse.

Également, rappelez-vous que nous cherchons à reconstituer la chronologie des évènements, c'est-à-dire l'ordre dans lequel ils sont produits.
Or, chaque évènement est la conséquence de celui qui l'a précédé.  Cherchez à mettre en évidence les liens entre une cause et ses effets.
Par exemple : Si José et Antonia ont pu bénéficier du regroupement familial, c'est parce que José avait pu quitter le camps grâce à son contrat de travail. Le regroupement est donc forcément postérieur à l'embauche.

Et, en dernier ressort, organisez votre récit selon ce qui vous parait en être le déroulement logique.

Soyez bien attentif : il ne faudrait pas qu'au milieu de tous ces copier/coller, qu'au hasard d'une mauvaise manipulation, vous perdiez l'une ou l'autre de ces anecdotes que vous vous êtes donné tant de mal à sauver de l'oubli !

Conseil n°11 : Utilisez une ligne du temps

Il parait qu'il existe des générateurs gratuits de ligne de temps et des modèles de frise chronologique vide à télécharger, tout aussi gratuits. Il parait également que ces outils sont faciles à utiliser.
Personnellement, je ne m'en suis jamais servie. Alors, à part vous dire que cela existe, je ne saurais en parler.

Mais, avec un peu de papier, des crayons, du scotch et des post-it de couleur, il est très facile de bricoler une frise qui fera tout à fait l'affaire.
L'objectif de regrouper les faits qui ont marqué la vie des membres de votre famille dont vous êtes en train de reconstituer le parcours, est d'obtenir une vue d'ensemble à la fois claire et détaillée de votre histoire familiale.

Avant tout, il vous faut un support. Préparez une longue bande de papier sur laquelle vous allez tracer votre flèche du temps. La flèche commence tout à gauche de la bande de papier et finit tout à droite.
Vous y positionnerez les post-it dans l'ordre chronologique : depuis l'évènement le plus ancien (qui sera tout à gauche) jusqu'au plus récent (qui prendra place tout à droite).

Dès que la bande de papier est prête, vous pouvez commencer à compléter votre frise.

Positionnez d'abord les dates-clés de la vie, comme les naissances, les mariages et les décès, en précisant le lieu (nous y reviendrons) et le nom des personnes concernées.

Puis, complétez votre ligne en ajoutant les faits marquants de votre histoire familiale : les déménagements successifs, les séparations, les mobilisations, les regroupements, les périodes d'internement dans les camps, ...
Lorsqu'une date vous est connue, notez-la sur le post-it correspondant.
Vous ne connaissez pas une date ? Ce n'est pas un problème. L'important est que le post-it soit quand même présent sur la frise. Plus tard, vous le déplacerez ou pas.

Enfin, n'oubliez pas quelques repères historiques : 14 avril 1931 proclamation de la république, octobre 1934 révolution des Asturies, 17 et 18 juillet 1936 soulèvement militaire, 1er avril 1939 fin de la guerre civile, etc...  Pour plus de facilité, vous pouvez piocher dans la chronologie que je mets à votre disposition dans la rubrique "ressources". Cantonnez-vous aux évènements qui ont marqué votre histoire familiale. Vous pourrez toujours faire des ajouts par la suite, au besoin.

Car votre graphique va accompagner vos travaux jusqu'à leur terme.
Il va parfois vous suggérer de bonnes questions. Ainsi, c'est en remarquant que le cousin Paco est né à Cuenca en 37 qu'on sait que la route de l'exil de la tante Angustia passe par La Mancha !
Il vous permettra de visualiser les périodes à investiguer et nous verrons comment lorsque nous aborderons la partie "combler les zones d'ombres".
Et, en vous offrant une vision d'ensemble du chemin parcouru par votre famille, il vous guidera -tel un fil d’Ariane- dans les relectures de votre document-texte.

Sur une frise chronologique,

visualisez le parcours de vie

des membres de votre famille

depuis la période qui a précédé la guerre civile,

jusqu'à la fin de la dictature.

Conseil n°12 : Matérialisez les itinéraires

 

Illustrez votre récit

en traçant sur une carte unique

le chemin de Retirada de chacun

des membres de votre famille,

depuis sa région d'origine,

jusqu'à l'endroit où il se trouvait

à la fin de votre récit.

 

Souvent, le chemin de l'exil a dispersé les fratries, séparé les femmes de leurs maris, les enfants de leurs pères.

Alors, reconstituer le parcours d'une famille, ce n'est pas retrouver le tracé d'une route unique, mais de plusieurs ; des routes qui se séparent, s'éloignent les unes des autres, se croisent parfois, se rejoignent peut-être.

Que vous ayez reconstitué ces parcours dans leur entier ou que demeurent quelques interrogations, une carte regroupant tous les itinéraires pourra utilement illustrer votre récit.

Pas besoin de savoir dessiner, ni de connaître parfaitement sa géographie. Vous trouverez facilement sur Internet une carte qui vous conviendra. Selon votre histoire familiale, vous aurez besoin de faire apparaitre toute l'Espagne, ou seulement sa moitié Nord, ou juste la Catalogne. Adaptez la carte que vous avez choisie en la recadrant de façon à conserver toutes les régions traversées mais seulement celles-ci. Puis agrandissez-la au maximum.

Imprimez la carte ainsi obtenue et localisez les différents endroits où se sont trouvés les membres de votre famille, depuis la région d'Espagne dont ils sont originaires, jusqu'à l'endroit où ils étaient au moment où s'achève votre récit.

Puis, à l'aide de crayons ou de fils de couleur, reliez les points entre eux afin de matérialiser les itinéraires parcourus. En cas de doute, par exemple si vous ne savez pas si Firmín a d'abord été interné au camp de Judes puis à celui d'Argelès-sur-Mer ou inversement, interrompez le tracé de son itinéraire. Vous le complèterez plus tard, lorsque vous saurez.

Enfin, pensez à légender votre illustration en indiquant à qui correspond chaque itinéraire de couleur.

Conseil n°13 : Soyez pragmatique

Il arrivera certainement que, à l'un ou l'autre moment de vos travaux sur la mémoire de votre famille, vous n'arriviez pas, mais vraiment pas, à dater un souvenir, à le situer sur votre ligne du temps, à lui trouver une place -la sienne- dans la chronologie des évènements.

Il arrivera que vous ne sachiez ni en quelle saison, ni en quelle année, ni en quel endroit, ni rien de rien ! Que vous ne disposiez d'aucun indice, d'aucun début de piste pour vous aider à marquer le point de départ de l'anecdote ou de l'évènement.

Et bien tant pis ! Soyez pragmatique, positif et réaliste : acceptez de faire avec ce que vous avez !

Conservez le souvenir pour ce qu'il est, un souvenir, et gardez-le comme il est, sans fioriture.

Ne cédez pas à la tentation de lui inventer un contexte. Attribuez-lui une place dans la trame de votre histoire familiale ; la place qui vous parait être la plus logique et... passez à autre chose !

 

En dernier ressort,

à défaut de disposer d'éléments

vous permettant de dater les évènements,

organiser votre récit

selon ce qui vous parait en être la chronologie.

 

On passe à la suite ?

Maintenant que vous avez une vue d'ensemble des routes d'exil de votre famille, passons à la suite.

Vous pouvez choisir de collecter les souvenirs combler les zones d'ombre ou de replacer dans le contexte

ou bien, si vous êtes déjà passé par toutes ces étapes, d'aborder la phase finale : Mettre en forme et transmettre

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